les chalands en béton de la rivière de Morlaix

Nous pouvons passer devant sans nous en rendre compte, invisible depuis la route du bas de la rivière il ne se découvre qu’à marée basse depuis la corniche de Carantec après le tournant de Toul Mao. Il s’agit du chantier naval Joyeux fils, entreprise plutôt particulière et dont l’existence fut très courte, deux années.

A la suite de la première guerre mondiale et face à la pénurie de matière première tel que l’acier, le gouvernement français sous la houlette de M. Bouysson sous-secrétaire au commissariat aux transports maritimes à la marine marchande lança un programme de navires en ciment armé pour le compte de l’état.

La rivière de Morlaix fut l’hôte de ce programme à l’instar du Havre, de Lorient, de Bordeaux… et dont la construction du chantier interpela les morlaisiens: « Il se détache en jaune d’or sur le paysage de verdure du bas de la rivière. A ses pieds, à ses pilotis plutôt, 8000 mètres carrés d’ateliers sont animés par une centaine d’ouvriers de toutes spécialités.« , nous renseigne l’ouest-éclair le 13 août 1919 sur la citerne d’eau douce qui y est érigée.

Le chantier doit construire des chalands de haute mer de 1000 tonnes pour transporter du charbon aux dimensions importantes, 53m par 10m60 de large. M. Joyeux est l’entrepreneur de la construction du chantier qui est dirigé par un certain M. Valteau, ingénieur.

En fouillant dans le journal local Mouez Ar Vro – « La voix du pays » diffusé de 1919 à 1920 à Morlaix – l’entreprise ne fut pas sans difficultés car de novembre 1919 à janvier 1920, une grève arrêta totalement le chantier.

 

Entrefilet de novembre 1919 du journal Mouez Ar Vro
Entrefilet de novembre 1919 du journal Mouez Ar Vro

 

 

Entrefilet du journal Mouez ar Vro de janvier 1921
Entrefilet du journal Mouez ar Vro de janvier 1920

 

Programme lancé en 1919, il fut arrêté subitement par le successeur de M. Bouysson, M. Rio en 1921 suite aux débats menés à la chambre des députés. Soixante personnes furent licenciées du jour au lendemain.

L’éclaireur du Finistère nous rapporte en février 1921 les propos à la chambre des députés du sceptique M. Rio quant à l’utilité de ces commandes face à son détracteur:  « Ils ne seront bons qu’à couler comme brise-lame à l’entrée de quelque port » et le journaliste de conclure: « que les divers ministres qui se succèdent agissent sans plan bien établi et que les millions « sués » péniblement par les contribuables sont facilement…jetés à l’eau. »

Aujourd’hui subsiste les tins, ces murs qui servent de cale aux bateaux pendant la construction. Ces alignements de pierre plongent dans la rivière et sont les derniers vestiges de ce chantier naval. Sur la carte postale semi moderne publiée en tête, on distingue nettement la cale et en amont l’un des chalands construit.

 

carte postale semi-moderne de la rivière de Morlaix dans les années 60
carte postale semi-moderne de la rivière de Morlaix dans les années 60

 

photo aérienne du site aujourd'hui
photo aérienne du site aujourd’hui

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Jean-Marie Pouliquen Écrit par :

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